« Une Voie Lactée » Prix biennal hainuyer de l’Aide à la création audiovisuelle 2023

Le Prix biennal d’Aide à la Création Audiovisuelle récompense un.e cinéaste hainuyer.ère (né.e en Hainaut ou y résidant depuis 3 ans au moins) ou ayant tourné majoritairement en Hainaut. Il a pour objectif de consacrer la valeur d’un film court ou moyen métrage. 

En 2023, il a été accordé à Quentin Moll-Van Roy pour son film Une voie lactée. Quentin Moll-Van Roy a étudié la réalisation à l’IAD (Institut des Arts de Diffusion). Une voie lactée est son second court-métrage produit dans des conditions professionnelles, après quelques films autoproduits et à petits budget, remarqués par plusieurs festivals.

Entretient avec Quentin Moll-Van Roye

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire du cinéma ? 
Je suis tombé amoureux du cinéma à l’âge de 6 ou 7 ans, en regardant une cassette vidéo de Jurassic Park avec ma sœur. Ce film a vraiment provoqué un choc en moi : en découvrant ces images, je me suis dit “c’est ça que j’ai envie de faire plus tard”. Bien sûr, à l’époque la notion du métier de réalisateur était assez floue pour moi. Plus tard, à l’adolescence, j’ai reçu une caméra et j’ai commencé à faire des petits films avec mes cousins et mes sœurs et ça a confirmé mon envie de départ. Après ma rhéto je me suis directement inscrit à l’IAD (Institut des Arts de Diffusion) à Louvain-la-Neuve.  Après le Bachelier, je me suis dirigé vers le master en télévision parce que je n’avais à ce moment-là pas vraiment d’idées en tête, d’histoires à raconter et que le master en télévision m’intéressait aussi beaucoup.  Je suis sorti de l’IAD en 2014 et j’ai directement commencé à travailler en réalisation à la RTBF. Et puis en 2019, l’envie de raconter des histoires est revenue et j’ai commencé à réaliser des films à tout petit budget avec des amis. Et en voyant ces films “fauchés” rencontrer un certain succès en festival, j’ai eu envie de professionnaliser cette partie de mon activité. J’ai donc pris contact avec une productrice en 2020 et 3 ans plus tard, Une voie lactée était terminé. Donc pour le moment, je continue la réalisation télévisuelle et je développe parallèlement des projets cinéma. 

Est-ce que l’expérience acquise à la télévision est une plus-value pour votre activité
cinématographique? 

La télévision et le cinéma impliquent deux façons de travailler très différentes, mais je pense que mon expérience en télé m’aide vraiment dans la gestion d’un plateau, du temps et des plannings de tournage. La télévision m’a permis de développer un côté débrouille très utile lors d’un tournage cinéma. Parmi vos films précédents on retrouve Ils surveillent, un film de science-fiction et Black face, un
film d’horreur alors qu’Une Voie Lactée est plutôt un drame social, quel lien pouvez-vous tracer entre ces films? Je suis un amoureux du cinéma de genre. Je pense qu’on peut aborder plein de sujets par le biais de la peur, de l’horreur. Mais pour moi, c’est plutôt le sujet qui va déterminer le genre. C’est vrai qu’Une Voie Lactée est un drame social assez réaliste, mais il y a quand même une part d’horreur, surtout dans les yeux de l’enfant. Le film emprunte un peu les codes de ce cinéma-là. 

Une Voie lactée aborde le monde agricole, pourquoi avoir choisi ce milieu en particulier?
C’est un sujet qui m’intéresse depuis longtemps, je suis vraiment sensible à la détresse que rencontrent de nombreux agriculteurs. Je voulais aborder ce sujet depuis longtemps mais je ne suis pas moi-même issu de ce monde-là, donc au départ je ne savais pas vraiment comment en parler, mais ça restait toujours dans un coin de ma tête.  Et en 2019, j’ai perdu mon grand-père, et suite à cela j’ai réalisé à quel point ce genre d’événement peut avoir un impact important sur plusieurs générations. Et c’est donc à travers une histoire qui touche plusieurs générations que j’ai imaginé aborder la détresse du monde agricole. Cet aspect multigénérationnel permet, au-delà du monde agricole, de rendre la thématique du film plus universelle. 

Pourquoi avoir choisi de tourner en Hainaut? 
Le Hainaut est rapidement apparu comme une évidence, les paysages ruraux et les nombreuses exploitations agricoles qui s’y trouvent en faisaient l’endroit parfait. Nous avons été accompagnés par le Secteur cinéma pour nos recherches et particulièrement par Hugues Vanhoutte. Après avoir visité plusieurs lieux, Hugues nous a emmené dans une ferme qui aurait pu correspondre, mais les
intérieurs avaient été rénovés récemment, trop à notre goût. Les propriétaires nous ont dit que leurs voisins avaient une exploitation laitière qui pouvait correspondre à ce que l’on cherchait. En nous y rendant, nous nous sommes rapidement rendu compte que partout où l’on posait les yeux, le film que j’avais imaginé pourrait y prendre place. Et la famille qui vit dans cette ferme et l’exploite s’est montrée très enthousiaste à l’idée d’accueillir un tournage. 

N’était-ce pas trop compliqué de faire cohabiter un tournage professionnel avec la vie d’une ferme
en activité? 

Nous avons eu la chance de recevoir un accueil très chaleureux de la part de la famille exploitante. Au-delà de nos attentes même. Ils nous ont énormément aidé et ont été disponibles à 100%. A titre
d’exemple, nous pensions faire appel à un dresseur pour gérer les vaches et les fils de la ferme nous ont dit qu’ils pouvaient s’en charger eux-mêmes, qu’ils connaissaient leurs bêtes. Des liens se sont vraiment tissés entre l’équipe de tournage et la famille. A la fin du tournage nous sommes restés plus longtemps pour discuter avec eux. Je suis toujours en contact régulier avec cette famille. 

Le sujet ne leur a pas fait peur? 
Dès le départ, nous avons été très transparents sur le sujet du film, le but n’était pas de leur cacher quoi que ce soit. Les problèmes du monde agricole, ils connaissent bien-sûr… Ils parviennent à faire vivre la famille en partie grâce à l’activité de la ferme mais ils connaissent aussi de nombreux agriculteurs en difficulté et étaient donc contents de pouvoir contribuer à un film sur ce thème. 

Quels sont vos projets ? 
Maintenant j’ai envie de passer au long métrage. Je suis en processus  d’écriture, je ne veux pas trop en parler pour l’instant, mais je peux néanmoins dire que ce sera un film plus solaire, un peu le miroir inversé d’Une voie lactée.  Ce nouveau projet abordera aussi des questions de filiation et de paternité.  Un long métrage c’est long à développer, c’est parti pour des années, mais je suis très enthousiaste.